Elle s’appelait Lina

Dès 12 ans
Conception et narration: Aline Gardaz De Luca
Regard extérieur: Pauline Epiney
Son et lunmière: Dominique Fumeau

 

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Lettres réelles ou inventées ? Lettres perdues ou dissimulées ? Et si les bras nous manquaient pour écrire à l’autre, l’imagination pourrait-elle suffire à le rejoindre malgré tout ? Aline Gardaz de Luca a puisé dans son monde, celui du conte qu’elle pratique depuis de très nombreuses années. Elle tire le fil d’un récit épistolaire rare et précieux. Une création dans laquelle le merveilleux cohabite sans peine avec le quotidien. Les femmes y sont nombreuses, des héroïnes d’autre fois et d’aujourd’hui et un métier venu du fond des âges : Lina était couturière et Aline aime le bel ouvrage. Si la mémoire est flottante, les histoires restent à terre et la forêt n’est jamais loin.

Manuella Maury

Photos: Dominique Fumeau
Affiche: Dominique Studer

L’histoire

Lina est couturière. En un temps où il ne fait pas bon être fille-mère, elle élève sa fille seule au village. Le soir, à la lueur d’une chandelle, elle écrit à cet homme qui n’a pas voulu l’épouser et duquel elle a eu une fille. Les lettres restent sans réponse et mettent en mots un désir qui reste inassouvi. Loin de là dans une forêt, une jeune femme qui a dû fuir sa maison pense au père de sa fille. Elle ne peut ni le rejoindre ni lui écrire. Héroïne de conte merveilleux, elle attend dans la forêt que le temps fasse son œuvre.

Lorsque les lettres de Lina sont découvertes des années plus tard, un troisième récit se déclenche, celui d’un homme qui reçut des lettres d’une femme qui l’aima, miroir de Lina lorsqu’elle écrit. Cette femme continue à écrire bien qu’elle ne reçoive aucune nouvelle de son amant, elle reste dans ses rêveries et se soumet à un imaginaire qui la laisse seule. Lina, quant à elle, cesse d’écrire à l’homme absent et vit sa vie de femme. Et la jeune fille aux mains coupées se lève un matin et part à la reconquête de son mari.

La démarche

Cela fait quelques années que Aline Gardaz De Luca programme la nuit du conte à Mase et y conte. Cet évènement a été créé il y a plus de 25 ans par Manuella Maury et des passionnés de la commune. Des conteurs et conteuses de la région puis des professionnels ont laissé chaque été résonner leur voix dans les rues du village.

En 2021, Aline Gardaz De Luca présente son spectacle Les Pétales de Marguerite à la nuit du conte, programmation particulière due à la situation covid. La représentation a lieu et Manuella Maury, après des années de bourlingage et reportages, est de retour pour écouter les récits de la nuit du conte… Suite à cette soirée la journaliste invite la conteuse à créer un spectacle de récit oral pour le festival Lettres de Soie en 2023. Le travail de recherche de démarre…

Les contes dans lesquels des lettres sont échangées par le diable (ou par un personnage mal intentionné) sur le chemin sont nombreux dans le répertoire de tradition orale. Viennent à la mémoire d’Aline Gardaz De Luca d’autres histoires glanées au fil de ses années de travail de conteuse : les lettres perdues, celles qui n’ont pas été lues, restées au fond d’un coffre, ou celles auxquelles on n’a pas répondu…

Un jour, l’histoire de la vie de Lina, une couturière qui éleva sa fille seule dans la campagne en un temps où il ne faisait pas bon être fille-mère, revint à l’esprit de la conteuse. Le fil rouge du spectacle apparaît:  lettres que cette femme écrivit à l’homme qui était parti, lettres qui disent un désir enfoui, le temps de l’absence. En écho, le conte d’une jeune femme dont les mains ont été coupées, récit merveilleux dont les versions en Europe sont multiples. La conteuse imagine l’héroïne de ce conte merveilleux lorsqu’elle se retrouve dans la forêt: puisqu’elle n’a pas de mains, elle ne peut écrire à l’homme qu’elle a épousé, mais seulement penser à ce qu’elle aimerait lui dire. Les deux histoires se croisent en cet instant, l’une écrit ce que l’autre ne peut mettre sur papier. Dès lors les récits se mêlent et se répondent, le feu brûle, image récurrente qui interroge notre rapport au désir dans l’absence et à la façon dont ce temps est vécu. Anecdotes, récits de vie, contes de tradition orale de diverses origines se tissent pour raconter Lina et, à travers elle, des destins de femmes. Tels les fils de laine sur le métier à tisser, les histoires apportent chacune leur couleur pour créer cette fresque de destins croisés, dans un temps hors du temps qui questionne nos choix les plus intimes.

Aline rencontre Pauline Epiney lors des créations théâtrales de la comédienne. Les deux artistes aiment explorer et raconter des destins de femmes, leurs univers se répondent. Pauline accepte avec joie d’accompagner par son art de metteuse en scène et dramaturge la création d’Elle s’appelait Lina.